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Aumônerie

Mulan : faible comme une femme ?

Egalité entre homme et femme

Dans le train direction la Chaux-de-Fonds, je relis mes notes avant mon atelier sur la spiritualité dans les films. Là, je fredonne la chanson du dessin animé « Mulan », celle qui fait « je ferai de vrais hommes de vous ». Là, un signal d’alerte s’allume dans ma tête. Comment peut-on faire écouter ce genre des chansons aux enfants qui regardent un dessin animé ? Pourquoi leur faire croire qu’un homme doit être fort ? Pourquoi dire d’un homme qu’il est une « femmelette » parce qu’il n’est pas assez fort aux yeux de la société ?

Les dernières semaines, j’ai travaillé sur la place que prend la femme dans les écrits bibliques, notamment, le passage de la création des êtres humains. Je ne saurais dire combien de fois j’ai entendu « de toutes façons, l’homme a été créé en premier ! ». Ces deux éléments m’ont fait réaliser que la vision de la femme est encore « traditionnaliste ». Je pense qu’expliquer mon point de vue sur l’égalité entre les genres par la Création dans la Bible peut aider à revoir le sujet.

Dans le premier récit de création (Genèse 1, 27ss), la Bible dit : « Dieu créa l’Homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, mâle et femelle il les créa ». En effet, si nous arrêtons notre réflexion ici, il est compréhensible d’en déduire que le mâle est supérieur à la femelle. Lorsque nous continuons en reprenant le texte original, en hébreu, les choses deviennent différentes. Wayyibrā ‘elōhîm ‘et hā’ādām besalmōw. Le terme ha’adam se traduit ici, selon moi, par « humain ». La suite de la phrase permet une précision de l’explication de la création de l’être humain. Le premier texte de création est un entonnoir : il raconte la Création du général au précis. Ainsi, je comprends que le monde a besoin d’un humain, au sens large, pour peupler la terre. C’est uniquement après avoir pensé l’être humain qu’il (Dieu) le fabrique femme et homme, en même temps.

En regardant le deuxième récit de la Création (Gn 2,4ss – création de l’Humain à partir de la terre), la traduction des termes telle que nous la connaissons me semble également tronquée. Traduire ha’adam par homme et non par humain induit une erreur de compréhension. Pour moi, le mot ‘îs désigne l’homme mâle, alors que le terme ha’adam englobe tout être humain, l’Homme. Mais un autre passage de ce récit peut, selon moi, être utile à la défense d’une égalité entre les genres. Dieu affirme qu’il n’est pas bon pour ha’adam d’être seul. Il décide donc de lui faire une ‘êzer kenegdōw, une aide qui soit son vis-à-vis. Certes, on y lit que la ‘îsha est issu de ‘îs. Je conçois que certain-e-s le comprennent comme primauté de l’homme sur la femme. Cependant, l’affirmation de vis-à-vis l’un de l’autre permet de souligner un équilibre entre les deux. 

Je pense que ces deux récits montrent que la femme est le vis-à-vis de l’homme. Pour aller dans le même sens et reprendre le déclencheur de cette réflexion, Mulan montre, tout au long de l’histoire, qu’être une femme ne l’empêche en rien de faire partie de l’armée et de se faire accepter au même point qu’un homme. Elle sauve même toute son armée à elle-seule. Même si la chanson « être un homme » m’a secouée, le film permet une réflexion. Il apporte une morale allant dans le même sens que les récits de Création tels que je les lis et les interprète personnellement.